Plus de deux mille ans d’histoire
Pourquoi la ville fut-elle implantée sur ce site ? La géographie est un facteur explicatif décisif. En effet, c’est à cet endroit que le passage des Vosges apparut très tôt le plus aisé. L’escarpement de la faille vosgienne y est le moins élevé et le plateau lorrain se situe à faible distance.
Un relais de poste gaulois puis une cité romain
Dès la fin du 2ème siècle avant J-C existe, au sommet du col de Saverne, l’oppidum du Fossé des Pandours, fondé par des Gaulois. Au début du 1er siècle de notre ère, au haut du col, est attesté le site gallo-romain dénommé Usspann : on y dételle les chevaux de renfort nécessaires pour la montée. C’était un poste de relais avec auberges, ateliers, boutiques. A la même époque, les Romains installent un gîte d’étape au pied du col, dans la partie basse de la ville actuelle. L’importance stratégique du site est donc établie : il permet de contrôler la voie reliant Metz (Divodurum) à Strasbourg (Argentorate). C’est, avec la trouée de Belfort, le principal axe de franchissement du massif vosgien.
La première fortification maçonnée de la ville haute date du 3ème siècle. Une garnison romaine séjourne probablement à Tabernis en 310 et construit un grand castrum pour protéger les frontières de la Gaule. Cette enceinte d’un périmètre d’environ 1 000 mètres est flanquée de 37 tours. En 357, Ammien Marcellin mentionne Tres Tabernae à propos de la campagne de l’empereur César Julien contre les Alamans. La présence romaine attestée prend fin au début du 5ème siècle.
De nombreuses pièces de cette époque gallo-romaine sont exposées au musée.
Une ville épiscopal
L’histoire de la ville au haut Moyen-Âge n’est guère connue. Tout au plus savons-nous que, germanisée, elle s’appelle Ziaberna à la fin du 5ème siècle.
A partir du 12ème siècle, Saverne occupe progressivement une place à part parmi les autres villes d’Alsace, par le lien entretenu avec les évêques de Strasbourg. Le Château du Haut-Barr apparaît au début de ce siècle, et ces derniers vont veiller à le contrôler. En 1236, l’un d’eux obtient de l’Empereur Frédéric II la suzeraineté sur la ville. Lui et ses successeurs restent les maîtres de Saverne jusqu’à la Révolution. Les frères hospitaliers de Steigen (Obersteigen) fondent un couvent et une église en 1303 : c’est l’actuelle église des Récollets.
Le cloître du couvent est remarquable par ses baies gothiques et par ses peintures murales datées des 16ème et 17ème siècles.
En 1394, sous Guillaume de Diest, la ville devient résidence des évêques et siège de leur administration, c’est-à-dire des territoires appartenant à l’évêque, qui n’ont rien à voir avec l’étendue du diocèse. La Régence épiscopale s’occupe de l’administration, de la justice (au civil et au criminel) et des finances. Ses services sont installés dans la Chancellerie, l’actuel Tribunal de grande instance, non loin du château supérieur, qui accueille l’actuelle sous-préfecture. Deux évêques marquent particulièrement la cité : Albert de Bavière (1478-1506) et Guillaume de Honstein (1506-1541). On leur doit d’importants travaux dans l’église Notre-Dame-de-la-Nativité ainsi que dans le château supérieur (Oberhof). La ville se développe entre le 15ème et le 18ème siècles : édifices religieux, constructions administratives, civiles et résidentielles que l’on peut encore voir dans la ville haute. La population s’accroît sensiblement avec l’arrivée de personnel occupant des fonctions liées au rôle administratif. Si la Réforme ne s’impose pas dans la ville épiscopale, celle-ci est néanmoins le théâtre de massacres pendant la Guerre des Rustauds. En 1525, les paysans insurgés sont accueillis dans la ville qui est assiégée par le Duc de Lorraine. La reddition finit en massacre et la cité est dévastée par les soldats. Durant une grande partie du 17ème siècle, la cité épiscopale souffre des conflits entre la France et l’Allemagne : le faubourg et la basse ville sont régulièrement touchés.
Des remparts plusieurs fois détruits puis restaurés, il reste que quelques vestiges encore bien visibles.
Le Versailles alsacien au 18ème siècle
Saverne connaît une période faste au 18ème siècle, sous les épiscopats des quatre évêques de la famille des Rohan. Le château inférieur des Furstenberg est rénové et son parc considérablement agrandi. Des fêtes somptueuses s’y donnent. On a parlé de « Versailles alsacien ». De cette période date le premier « contournement » de la ville : c’est l’actuelle route du Col de Saverne, achevée en 1737. La population affiche un fort accroissement durant ce siècle : estimée à 1 400 habitants à la fin du 17ème siècle, elle passe à 4 151 en 1791
L’essor du 19ème siècle
Avec la Révolution, la ville perd de sa superbe : le cardinal Louis-René-Édouard de Rohan émigre en 1790, ses biens sont confisqués et son administration disparaît. Le passé administratif de la cité est maintenu : elle devient chef-lieu d’arrondissement et siège d’un tribunal d’instance en 1800. Deux faits majeurs sont à relever dans le domaine des transports : le chemin de fer (1851) et le canal de la Marne au Rhin (1853) permettent un développement accru des activités, notamment de l’industrie. En 1852, la ville cède le Château des Rohan – très délabré – à l’État. Napoléon III le fait restaurer pour lui donner son aspect actuel. Après l’annexion de 1871, le château sert de caserne à l’un des deux bataillons du 99ème Régiment d’Infanterie, l’autre s’installant dans les casernes dites nouvelles de la rue Saint-Nicolas – de nos jours le lycée Jules-Verne et les établissements Hager. La présence de cette garnison d’importance tire économiquement la cité, tout comme l’édification de nouveaux bâtiments – la poste, la mairie – et la présence d’activités industrielles – métallurgie Demange, brouettes Haemmerlin, matériel agricole Kuhn..
« L’affaire de Saverne » éclate en novembre 1913 : un jeune officier prussien insulte et malmène des recrues alsaciennes. Émoi dans la population, arrestations de civils. Le Parlement de Berlin est saisi. Militaires et immigrés allemands font progresser sensiblement la population, qui passe de 5 905 habitants en 1871 à 9 153 en 1910. L’architecture de nombreux bâtiments atteste de cette période
De la Prusse au Reich
Après 1918, la vie s’écoule tranquillement. Le château accueille le 10ème Bataillon de Chasseurs à Pied (1922). La Société des Amis des Roses, fondée en 1898, organise le premier corso fleuri en 1923. La ville se dote d’un nouvel hôpital, d’un collège (l’actuel lycée Leclerc). Le Bouc d’Or se couvre de maisons. En 1931 est créé le Jardin botanique du Col de Saverne. L’industrie de l’horlogerie prend son essor, avec Vedette.
Avec l’armistice de 1940, l’Alsace est annexée au Reich. Le régime nazi s’impose à toute la population, les récalcitrants étant éliminés ou déportés. Une partie des Alsaciens – les Malgré-Nous – sont contraints de combattre sous l’uniforme nazi. Saverne est libérée le 22 novembre 1944 par l’avant-garde de la Deuxième Division Blindée du Général Leclerc sortie de la forêt de Dabo, prenant à revers l’occupant.
Le développement, avec Adrien Zeller
Après guerre, la ville poursuit son développement. Elle participe à la réconciliation franco-allemande en inaugurant son jumelage avec Donaueschingen dès 1964. De nouveaux quartiers voient le jour, avec de l’habitat collectif et les équipements nécessaires – cinémas, piscine, écoles… De 1977 à 2001, Adrien Zeller est le maire et la figure de la ville. Président de la Région Alsace de 1998 à 2009, européen convaincu, il œuvre en faveur d’un humanisme rhénan. La ville entre dans le 21e siècle avec une gare ferroviaire rénovée et une nouvelle gare routière, et des projets plein la tête, avec la consultation prospective « Saverne 2030 ». La place du Château est ainsi rénovée pour devenir un lieu de convergence, avec ses terrasses, dans un esprit d’accessibilité pour tous – maintien des places de stationnement et zone de rencontre.
Pour en savoir plus
Pour en savoir plus, s’adresser à la Société d’Histoire et d’Archéologie de Saverne et Environs (SHASE)
Contacter la SHASE
Centre Alphone WollbrettParc du Château - BP 90042 - 67701 SAVERNE CEDEX
shase@wanadoo.fr
03 88 71 06 01
09 67 32 06 01